FPT : quelles solutions pour compenser la baisse de rémunération des arrêts maladie depuis mars 2025 ?

Publié le 30 avril 2025 à 14h08 - par

Depuis le 1er mars 2025, un changement réglementaire majeur impacte les agents de la fonction publique : la rémunération des trois premiers mois d’arrêt de maladie ordinaire est passée de 100 % à 90 % de leur traitement indiciaire. Cette réforme suscite des interrogations légitimes au sein des collectivités territoriales sur la possibilité de compenser cette perte de rémunération, au nom d’une politique sociale plus favorable.

FPT : quelles solutions pour compenser la perte de rémunération des agents en arrêt maladie ?
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Entre limites du principe de parité avec la fonction publique d’État, marges de manœuvre locales et rôle des organismes de prévoyance, des options réalistes de gestion de la difficulté par les employeurs publics locaux peuvent être trouvées.

Compensation des arrêts maladie par les employeurs locaux : un cadre juridique contraint

Le principe de parité entre les trois fonctions publiques impose que les régimes indemnitaires et de protection sociale des agents soient globalement harmonisés. Ainsi, une collectivité territoriale ne peut en principe accorder à ses agents une rémunération plus favorable que celle pratiquée dans la fonction publique d’État pour une situation identique. Cela signifie que la prise en charge directe par l’employeur public de la perte de 10 % du traitement d’un agent durant les trois premiers mois d’arrêt maladie pourrait être considérée comme une rupture de cette parité, et donc illégale.
La jurisprudence administrative, ainsi que les circulaires ministérielles, ont traditionnellement rappelé les limites à l’autonomie des employeurs territoriaux en matière de rémunération. Ainsi, dans son arrêt n° 221334 du 10 janvier 2003, le Conseil d’État a jugé qu’en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires prévoyant le maintien du régime indemnitaire, un agent ne peut prétendre au versement de celui-ci durant sa période de congé de maladie. Les initiatives qui s’éloigneraient trop du cadre national pourraient faire l’objet de contentieux, comme l’a illustrée l’affaire de la Commune de Saint-Paul c/ Préfet de la Réunion (CAA de Bordeaux, 4 juillet 2017, n° 15BX04033), où une collectivité avait tenté d’indemniser au-delà du cadre légal et s’était vue rappeler à l’ordre par le juge administratif, voire d’un contrôle de l’illégalité par le préfet. Toutefois, certaines collectivités tentent de faire bouger les lignes.

Les pistes d’action indirectes pour amortir la perte de rémunération

Une alternative sérieuse pour compenser la perte de traitement réside dans la souscription par la collectivité auprès de mutuelles, d’un contrat de prévoyance labellisé, avec un niveau de garanties adapté. Ces contrats permettent de maintenir un niveau de rémunération proche de 100 %, grâce à des indemnités journalières versées par l’assureur. Ils peuvent être cofinancés par l’employeur dans le cadre de la participation à la protection sociale complémentaire (PSC), récemment rendue obligatoire.
En parallèle, les agents peuvent bénéficier de garanties individuelles souscrites via des mutuelles partenaires, souvent plus souples. Certaines de ces offres prévoient une couverture dès le premier jour d’arrêt, venant ainsi suppléer la baisse de rémunération. Toutefois, le coût de ces options reste à la charge de l’agent, sauf si la collectivité participe financièrement via la protection sociale complémentaire (PSC).

Une mobilisation politique locale : l’exemple de la ville de Sceaux

La municipalité de Sceaux a adopté en conseil un vœu, présenté par le maire Philippe Laurent, visant à interpeller l’État sur les effets de la réforme « injuste, inéquitable et inefficace ». Ce vœu réclame le maintien de la rémunération à 100 % pour les agents en arrêt maladie et affirme : « Le service public local ne saurait être fragilisé par une mesure inéquitable à l’égard de ses agents ». Ce texte, bien que symbolique, a été transmis aux autorités préfectorales et aux parlementaires du département demandant le maintien du versement à 100 % du traitement durant les arrêts maladie. Même si ce vœu n’a pas de portée juridique contraignante, il témoigne d’une volonté politique forte d’engager un débat sur les limites actuelles imposées aux employeurs locaux. Ce type d’initiative pourrait préfigurer une mobilisation plus large des employeurs publics locaux et des associations d’élus pour demander une évolution du cadre réglementaire.

La baisse de la rémunération des agents en arrêt maladie constitue un véritable casse-tête pour les collectivités territoriales, partagées entre volonté sociale et contraintes juridiques. Si une compensation directe apparaît difficile dans le cadre actuel, la mobilisation de contrats de prévoyance et l’engagement politique peuvent offrir des alternatives pertinentes. L’avenir de cette question dépendra en grande partie de l’évolution des textes nationaux et de la capacité des employeurs publics à faire entendre leur voix.


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